Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Démocraties

Contact

Archives

Articles RÉCents

20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 21:17
Colonel de gendarmerie (er) Michel ROBARDEY

Assistant technique « Police judiciaire » au Rwanda de septembre 1990 à septembre 1993



robardey.jpgPour ceux qui ont, ne serait-ce qu’un peu, connu le Rwanda avant 1990, la question de savoir qui était au courant que la situation créée par  la « Guerre d’octobre » présentait un risque très important de  génocide n’a aucun sens. Elle est même d’une rare hypocrisie car, en fait, nul ne peut prétendre l’avoir ignoré.

1°) Un désastre prévisible et attendu dès 1990

En effet, dès le 15 octobre 1990, l’Ambassadeur de France à Kigali n’hésite pas à envisager, dans un télégramme diplomatique, la perpétration d’un «génocide »  comme une éventualité à craindre (cf. Enquête parlementaire française de 1998. annexes). Pourtant, il faudra attendre juillet 1994 et plusieurs centaines de milliers de morts pour que ce vocable soit accepté par l’ONU !

Encore plus précis, quelques jours plus tard, le 24 octobre 1990, trois semaines seulement après le début de la guerre d’octobre,  le Colonel GALINIE, attaché de défense près l’Ambassade de France à Kigali rédige un télégramme diplomatique intitulé « Appréciation de la situation politique » dans lequel il relève le risque, en cas de victoire du FPR, de « …..selon toute vraisemblance,  l’élimination à l’intérieur du pays des tutsis, 500 000 à 700 000 personnes, par les hutus  7 000 00 d’individus » (cf. Enquête parlementaire française de 1998. annexes).

Cette affirmation s’appuyait sur l’histoire récente du pays.

11. Les précédents (prolégomènes) de la 1° république

Dans un discours prononcé en mars 1964,  Grégoire Kayibanda invite la toute récente diaspora tutsi à rentrer au Rwanda, confirmant par la même occasion que, comme cela avait déjà été observé depuis la révolution sociale de 1959, toute attaque contre le Rwanda conduite par les « Inienzi »   entraînait des représailles sur les tutsis de l’intérieur   « ....en supposant que vous réussissiez l’impossible de prendre d’assaut la ville de Kigali, dit le président rwandais, expliquez-moi un peu comment vous vous imaginez le chaos qui résulterait de ce coup d’éclat ...... Je n’insiste pas, vous le devinez car sinon vous n’agiriez en séides et en désespérés. Vous le dîtes entre vous : ce serait la fin totale et précipitée de la race tutsi. ». (CF. Periès et SEVENAY dans « Une guerre noire » p. 138 ou DESOUTER dans « Le procès du FPR ») ).

Cette prise en otage des tutsis de l’intérieur pour empêcher les attaques des tutsis de l’extérieur prendra fin, sur le terrain, avec l’arrêt des incursions des « Inienzi » au cours de l’année 1967. Elle restera cependant dans les mémoires, en sommeil, sous la « Pax Habyarimana » de dix-sept années au cours desquelles, bien que l’accès aux fonctions politiques militaires et administratives leur soient à peu près interdites, les tutsis vivront en paix et prospéreront économiquement au Rwanda.

Malgré cette révolution «morale » de 74 qui voulait rompre avec la 1° république,  malgré les négociations bien engagées en 1990 avec l’Ouganda afin de permettre le retour au pays des réfugiés rwandais, le régime Habyaramina se verra accusé en 1990 – de manière anticipée et préventive - par une nouvelle génération «d’Inienzi » de porter avec lui le spectre du génocide. 

De fait, dès l’attaque du 1° octobre 1990, les vieux réflexes ont joué et quelques huit mille opposants présumés au régime sont arrêtés et regroupés au stade de Nyamirambo à Kigali.

Tout le monde craignait le pire alors et nul ne pouvait prétendre ne pas savoir que la commission d’un génocide était à nouveau devenu fort probable au Rwanda. Les agitations médiatiques récentes sur le thème : « On a ouvert les archives d’ici ou de là et Untel savait »  n’ont aucun sens historique : ce n’est que de l’agitation et de la propagande !



Retrouvez la suite de l'intervention dans les actes du colloque par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 20:41
Général (2S) Jean-Claude LAFOURCADE

Ancien commandant de l’opération Turquoise au Rwanda

lafourcade.jpg
Mon témoignage et mon analyse porteront  sur mes responsabilités de commandant d’opération au Rwanda de juin à août 1994.
Je rappelle que Turquoise est une intervention décidée par l’ONU, à la demande de la France, avec le mandat d’arrêter les massacres et de protéger les populations. Cette opération dont le bilan a été unanimement salué à l’époque, fait l’objet aujourd’hui d’accusations aussi graves qu’infondées.

1 – LE CONTEXTE DE L’INTERVENTION :
Première observation

Conformément aux accords d’Arusha, l’armée française avait quitté le Rwanda en 1993 et une force de l’ONU de 2500 hommes (MINUAR) avait été mise en place pour faciliter et contrôler la mise en oeuvre de ces accords.  Il n’y avait donc plus de militaires français au Rwanda au moment du drame (excepté les éléments de sécurité et de transmissions implantés à l’intérieur de l’ambassade).
Au plus fort des massacres, en avril 1994, le Conseil de sécurité a décidé le retrait des trois quarts de cette force. Il ne restait au Rwanda qu’environs 300 hommes de la MINUAR aux ordres du Général Dallaire. Je remarque au passage que ces militaires sont restés passifs devant des massacres qui se déroulaient sous leurs yeux.

Deuxième observation

La décision d’intervention a été prise en période de cohabitation Mitterand-Balladur.
Une fois la décision prise et la résolution de l’ONU votée le 19 juin, il y a eu une grande cohérence au plus haut niveau de l’Etat dans le contrôle de l’opération que je commandais et dont la réussite a été saluée par tous. L’opération Turquoise n’était donc pas un enjeu de politique intérieure et elle était défendue et l’est toujours, par les principales formations politiques.

Troisième observation

Le mandat de l’ONU fixait des conditions contraignantes pour l’exécution de la mission sur le terrain.
La résolution 929 prescrivait d’arrêter les massacres et de protéger les populations. D’une durée limitée à  deux mois, le temps qu’une nouvelle force de l’ONU soit mise en place, cette mission devait être exécutée en toute impartialité, c'est-à-dire sans prendre part au conflit entre les Hutus des Forces Armées Rwandaises (FAR) et les Tutsis du Front Patriotique Rwandais ( FPR). Cela signifiait d’une part, qu’il ne fallait pas apporter de soutien aux FAR que nous avions formé et soutenu pendant la période de coopération militaire et qui nous voyaient arriver comme des sauveurs, d’autre part que nous ne devions pas affronter le FPR qui avait fait des déclarations belliqueuses à notre encontre.
Ce contexte impliquait de disposer d’une force robuste pour éviter d’être mis en difficulté comme l’avait été l’armée américaine en Somalie. Il impliquait également un grand discernement, une certaine prudence et la maîtrise  dans l’engagement de la force.

Retrouvez la suite de cette intervention en vous procurant les actes du colloque par mail.

Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 19:01
Colonel (er) Jacques HOGARD

Commandant du Groupe sud de l’opération Turquoise au Rwanda du 30 juin 1994 au 21 août 1994, auteur de « Les larmes de l’honneur »



hogard.jpgEn 15 minutes, je ne reviendrai pas sur le déroulement de l’opération TURQUOISE à laquelle j’ai eu l’honneur et la fierté de participer comme chef du groupement sud durant l’été 1994 au Rwanda, dans ce pays-martyre qui sortait à peine d’une tragédie sans précédent, celle du génocide épouvantable qui venait de s’y dérouler à l’encontre de la communauté Tutsie mais aussi de nombreux Hutus - dans l’indifférence absolue de la communauté internationale et malgré les efforts de la France pour le faire cesser.

L’opération Turquoise est depuis 1994 l’objet d’attaques et de remises en cause inacceptables, que j’estime toutes dictées par des considérations d’ordre idéologique ou politique, visant à décrédibiliser la France et les pays africains qui y ont participé.

Devant ces attaques reprises jusqu’en France hélas par quelques individus et organisations aussi partisans que sectaires, tous forts de leurs certitudes en béton armé, j’ai décidé en octobre 2005, de livrer mon propre témoignage, celui d’un soldat qui avait été engagé sur le terrain, d’un soldat qui a fait ce qu’il a pu, dans le cadre espace-temps qui lui était fixé, à l’instar de ses chefs, de ses pairs ou de ses subordonnés, pour mettre un terme à l’horreur, c’est à dire aux massacres et règlements de compte de tous ordres,  et ramener un peu d’ordre et de paix sur une parcelle de sol rwandais.

Je ne vais donc pas reprendre ici en si peu de temps ce que j’ai par ailleurs écrit dans ce petit livre, que beaucoup d’entre vous ont probablement lu.
Par ailleurs le Général Lafourcade qui a été le patron respecté de cette opération, vient de vous en faire la description, de vous en rappeler le contexte, le déroulement, les enjeux…

J’ai donc choisi délibérément, simplement – cela peut vous étonner – d’appeler votre attention sur « l’après-Turquoise »…

Ce que j’ai à dire est très important, car si tout le monde ne connaît pas ou mal l’histoire contemporaine rwandaise, tout le monde connaît en revanche le contexte actuel des relations franco-rwandaises et en particulier la mise en accusation systématique de notre pays par les autorités actuellement au pouvoir à Kigali, la recherche obsessionnelle de la culpabilité française dans les dramatiques évènements de 1994 que l’on nomme avec raison de ce terme lourd de sens qu’est le mot « génocide ».

J’invite en effet les participants à ce colloque, en sortant de cette salle, à acheter en kiosque l’hebdomadaire « Valeurs Actuelles » qui parait aujourd’hui…

Ils y trouveront l’illustration de ce que peut-être une partie de « l’après Turquoise » pour un officier parmi d’autres, qui plus de treize ans après, ne peut pas rompre avec ce passé, qui fait désormais partie intégrante de sa vie.

J’ai donc choisi de vous raconter une histoire qui me tient à cœur, une histoire qui m’empêche souvent de dormir la nuit. L’histoire de deux Rwandais, de deux « Justes » Rwandais, le Major Augustin Cyiza et le Sous-Préfet Théodore Munyangabe.

 
Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 18:17
Jean-Marie VIANNEY NDAGIJIMANA

Ancien ambassadeur et ancien ministre des Affaires étrangères du Rwanda


vianney.jpgVous m'avez demandé de parler de mon parcours pour la période concernée : j'ai été nommé ambassadeur en France en Septembre 1990, quelques semaines avant l'attaque du Front Patriotique Rwandais (FPR) contre le Rwanda. J'étais auparavant Ambassadeur en Ethiopie avec juridiction sur l'Ethiopie, le Soudan, représentant permanent auprès de l'OUA (Organisation de l’Unité Africaine) et de la CEA (Commission des Nations Unies pour l’Afrique). Je suis arrivé en France fin Octobre 1990, c'est-à-dire un mois après l'attaque. C'est au moment où l'armée rwandaise venait de refouler les troupes du FPR vers la forêt, vers l'Ouganda d'où venait le mouvement rebelle.
C'est une étape charnière. J'arrive en France à un moment où mon pays est en guerre. J'y suis resté jusqu'à la fin de la guerre, c'est-à-dire jusqu'à la victoire du FPR. Dire que j'ai tout vu, dire "j'y étais" comme disent certains, alors qu'il n'y ont jamais mis les pieds, ce serait très prétentieux de ma part. Mais pour peu que je sois parvenu à faire mon travail comme mon devoir m'y obligeait par ailleurs, par amour pour mon pays, pour mon peuple, et aussi pour le pays dans lequel je représentais le mien, je peux aujourd'hui témoigner de certaines phases importantes sur lesquelles malheureusement il y a tant de mythes développés par les uns et par les autres ; tant de mensonges, même, proférés à l'encontre de certains acteurs du processus rwandais.
Autre élément important me concernant : en 1991, au moment où le Rwanda entrait dans le multipartisme et où j'avais le choix d'appartenir à un parti ou un autre, parmi les forces en présences au Rwanda, j'ai choisi d'adhérer au Mouvement Démocratique Républicain (MDR). L’adhésion à un parti politique n'était pas interdit aux diplomates, ni à qui que ce soit d'ailleurs. Ce fut sans doute une grosse erreur de permettre aux fonctionnaires de participer directement et ostensiblement à la vie politique en termes de partis. C'est une très grosse erreur qui nous a coûté très cher.

Revenons à l'action de la France au Rwanda. Au moment où j'arrive en France, je suis reçu par les services du Quai d'Orsay pour présenter la copie de mes lettres de créances, par le Ministère de la coopération, pour faire connaissance et ensuite par le Président François Mitterrand, accompagné de son Ministre des Affaires Etrangères, Monsieur Roland Dumas. Ce qui m'a frappé, c'est le langage tenu par le Président Mitterrand, par le message adressé par mon intermédiaire au Président Habyarimana. Le Président Mitterrand a dit, comme il savait le faire, sans vous regarder en face mais en vous regardant quand même : "dites à mon frère qu'il faut parler." Au départ, je ne comprenais pas le sens qu’il donnait à cette courte phrase. Il a ensuite insisté et répété deux ou trois fois : "il faut parler, il faut dire au Président Habyarimana qu’il est facile de savoir quand, comment, et par qui une guerre a commencé ; mais on ne peut jamais savoir ni comment ni quand elle se terminera. Donc il faut négocier avec vos frères," disait le Président Mitterrand.
Moi qui venais d'Ethiopie, qui entendais les différents phantasmes selon lesquels le Président Mitterrand était l'ami indéfectible et personnel du Président Habyarimana, j'ai d'abord été étonné. Mais je me suis ensuite rendu compte qu'il n'était pas question de relations d'amitié personnelles mais plutôt interétatiques. La France était un pays ami, qui nous conseillait amicalement et qui avait raison de le faire, avec fermeté et on peut le dire, de façon claire.
"Il faut parler." A plusieurs reprises, j'ai assisté à des audiences présidentielles entre les deux Chefs d'Etat français et rwandais, à des rencontres entre le Président Habyarimana et le Chef d'État-major de l'Elysée, avec des conseillers de l'Elysée, avec certains hauts fonctionnaires ou certains Ministres. Jamais, contrairement à ce qu'affirment certains humanitaires, certains journalistes, la France n'a donné l'impression de conseiller la manière forte. En tous cas, pas à moi - et je m'en serais étonné -, et je l'aurais peut-être exprimé, parce que je n'étais pas nécessairement d'accord avec tout ce qui se passait au Rwanda. Jamais la France n'a conseillé la manière forte. Au contraire. Aujourd'hui, je m'étonne que certains veuillent faire passer l'idée que la France a aidé l'armée rwandaise de manière à tuer des tutsis ou des hutus de l'opposition appelés aussi des « Hutu modérés. C'est l'inverse qui s'est passé.

On peut aborder la question selon les différentes phases, selon les différentes étapes du processus Rwandais de 1990 à 1994.



Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque par  mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 17:26
Xavier de VILLEPIN

Sénateur honoraire, ancien président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des forces armées du Sénat


de_villepin_xavier.jpgEtant président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat, je me suis rendu au Rwanda, durant l'été 1994, avec mon collègue Guy Penne. L'objet de notre mission était de rencontrer les troupes françaises sur place. Nous avons pu constater que dans la tragédie rwandaise la France avait exercé ses responsabilités avec honneur et efficacité.

Le Président Quilès ayant dirigé une mission d'information très complète et remarquable, en 1998 sur le sujet, je me contenterai d'évoquer seulement quelques aspects de la question.


A . ANALYSE DES FAITS

Le génocide perpétré d'avril à juillet 1994 est une des grandes tragédies du 20ème siècle. Des centaines de milliers de personnes ont été assassinées parce qu'elles étaient tutsies. A nouveau, le monde connaissait une tentative d'extermination d'êtres humains en raison de leur naissance.

La France a mené avec le pays dirigé par le Président Habyarimana à partir de 1973 une politique de coopération destinée à favoriser le développement et la stabilité du pays et de la région des grands lacs.

Au début des années 1990, notre action s'est inscrite dans les orientations du discours de la Baule et visait comme contrepartie l'avancée du processus de démocratisation. Après le déclenchement des hostilités en octobre 1990, elle s'est efforcée de contribuer à l'élaboration d'une solution négociée entre le FPR (Front patriotique rwandais) et le gouvernement rwandais : rencontres à Paris en octobre 1991, janvier et juin 1992, qui ont permis le lancement des négociations d'Arusha. Parallèlement, la France a mené une action diplomatique au sein du Conseil de sécurité pour que soit mise en place une force internationale (création de la MINUAR : Mission des Nations Unies pour l'assistance au Rwanda- par la résolution 872 du 5 octobre 1993). L'attentat du 6 avril 1994 a mis fin à tout espoir de solution politique


Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 16:38
Raphaëlle DUFOUR est Présidente de l’ONG « Dignité internationale »

LA PERCEPTION DES ÉVÈNEMENTS ET LES LEÇONS À EN TIRER


Nous nous réunissons cette après midi pour la seconde partie de notre colloque.
Je m’efforcerai de présider cette table ronde comme cela a été fait ce matin, en permettant à chacun d’exprimer son point de vue, dans le temps qui lui est imparti, afin d’éclairer du mieux possible les tragiques événements qui ont déchiré le Rwanda et durant lesquels la France est intervenue, ce qui fait également débat.

Paul QUILES nous a engagés ce matin à écrire l’Histoire et il a raison. Avant d’être interprétation, l’Histoire est une succession de faits dont la chronologie et les interactions sont essentielles à la lecture qui en sera faite. Cette lecture positive ou négative influera longtemps sur les rapports entre les Rwandais, mais également sur ceux de la France et du Rwanda.

Sans doute ne pouvons-nous faire abstraction des conséquences de la colonisation période durant laquelle les alliances se sont construites au fil d’intérêts somme toute assez éloignés de ceux de la population de ce petit pays dont on a pu dire qu’un doigt posé sur la carte de l’Afrique le ferait disparaître.

Comment un peuple en vient-il à produire son propre génocide, je parle ici de ce qui est pour moi le peuple rwandais, puisqu’il nous a été dit ce matin que nombre de familles se comportent de Tutsis mais aussi de Hutus.

Génocide, double génocide ? Ces mots contiennent tant d’horreurs qu’ils me conduisent à poser la question première que chacun d’entre nous se pose : Comment est ce possible ? Quels sont les mécanismes qui engendrent le processus ? La France aurait-elle pu agir différemment ?

Enfin Mesdames et Messieurs, les Tutsis et les Hutus vont devoir réapprendre à vivre ensemble, comment faire, quel est le chemin ?

C’est à ces questions que nos intervenants vont apporter leurs réponses.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 15:52
Jacques GERARD, Membre honoraire du Conseil économique et social

Note liminaire

Que l’on me comprenne bien ! Avec cette cinquantaine de « questions impertinentes », il ne s’agit nullement pour moi de mettre en cause le comportement sur le terrain des troupes françaises ou onusiennes dont – sauf quelques exceptions limitées décrites par ailleurs et qui ne concernent nullement la France –, le comportement a généralement été parfaitement exemplaire. Mais bien de rechercher pourquoi elles n’ont pas reçu, au moment où il le fallait, parfois les moyens et plus souvent les instructions qui leur auraient permis de mettre fin au drame rwandais avant qu’il n’atteigne l’intolérable.

Introduction

L’introduction du rapport du 15 décembre 1999 de la Commission indépendante d’enquête sur les actions de l’organisation des Nations-Unies lors du génocide de 1994 au Rwanda s’interroge sur le rôle de la communauté internationale dans cet insupportable conflit : « Outre qu’elle n’a pas empêché le génocide, la communauté internationale n’a pas fait cesser la tuerie une fois qu’elle a commencé… »
Il ajoute ceci : « Il importe aussi que cette admission [celle de ses « défaillances »] s’accompagne… de la volonté résolue de faire en sorte que des catastrophes telles que le génocide au Rwanda ne se produisent jamais plus, où que ce soit. »
Ce rapport reconnaît que la communauté internationale n’a pas su apprécier convenablement les ressorts de ce conflit et les ambitions réelles de ses différents acteurs, qu’elle n’a pas su mobiliser les ressources et l’engagement politique nécessaires, qu’elle a commis de graves erreurs dans la mobilisation et l’affectation des moyens pour y faire face.
A l’analyse de ce rapport, mais aussi de celui de 2000 de l’OUA ainsi que du rapport parlementaire français de 1998 et des débats sénatoriaux belges de décembre 1997, permettez-moi de vous soumettre, selon un ordre à peu près chronologique, quelques questions que d’aucuns jugeront impertinentes et qui concernent la plupart des acteurs de cette crise majeure dans l’histoire de l’humanité. Si certaines d’entre-elles ont pu être clarifiées depuis la publication de ces rapports, qu’on veuille bien les ignorer.
Pour les autres, si des réponses satisfaisantes leur étaient données – et en particulier à celles qui visent à tirer des leçons pour l’avenir - je veux alors bien croire que, oui, il serait possible que de telles atrocités ne se reproduisent plus jamais !


Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 14:08
Pierre PEAN, Ecrivain, enquêteur


Pierre_Pean.jpgJe mène des enquêtes sensibles depuis une trentaine d’années. J’avais donc l’habitude d’être confronté aux manipulations en tout genre, mais ce n’était rien à côté de celles que j’ai détectées dans le dossier rwandais. J’avais aussi l’habitude des coups en tous genres pour me dissuader ou pour me punir de mon audace, mais ce n’était rien à côté des attaques dont je suis l’objet depuis bientôt deux ans. Me voilà traîné en justice en France et en Belgique pour incitation à la haine raciale, racisme, révisionnisme et quasi-négationnisme, des médias m’insultent et me diffament à longueur de colonnes. Jean-François Dupaquier, ici présent, n’hésite pas à contacter mes amis et à tenter de les convaincre de cesser leurs contacts avec moi, en proférant des injures insupportables, notamment en taxant mon livre de « brûlot raciste et révisionniste », écrit avec la « véhémence caractéristique de la presse d’extrême droite des années 30 ». Aurais-je brutalement changé dans ma soixante-huitième année ? Evidemment non. J’ai mené cette enquête avec les mêmes outils, la même déontologie que dans mes autres enquêtes. Mais le régime de Kagame protège sa vérité avec un arsenal de mots qui tuent. Quiconque tente d’approcher la vérité rwandaise - historien, enquêteur et même juge - est immédiatement taxé de révisionnisme, négationnisme.
En un quart d’heure, je n’ai évidemment pas le temps de dresser un tableau complet de la guerre de l’information que le FPR a mené parallèlement à sa conquête militaire du pouvoir. Une guerre que le FPR a jusqu’à maintenant gagnée et qui lui a assuré ,et lui assure toujours, sa légitimité. La manipulation de l’opinion internationale opérée par Kigali laisse loin derrière elle les manigances de Timisoara et des guerres d’Irak, car ces dernières ont été démasquées peu de temps après le déroulement des faits, alors que l’approche de la vérité sur le drame rwandais tombe encore sous le coup de l’infamie révisionniste et négationniste. Je me limiterai donc à décrire succintement quelques rouages de la mécanique de désinformation mise en place.



Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque, par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 13:17
Victoire INGABIRE UMUHOZA, Présidente de Forces Démocratiques Unifiées


Victoire-INGABIRE-UMUHOZA.jpgSuite à  la guerre déclenchée par le Front patriotique rwandais, FPR, le 1 Octobre 1990 et ses cohortes de tueries de masse ainsi qu’à l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion présidentiel rwandais, que tous les observateurs impartiaux considèrent comme le détonateur du génocide rwandais, un Rwandais sur trois fut emporté par cette folie meurtrière faite de crimes de génocide, de crimes de guerre et d’autres violations graves du droit humanitaire international d’une ampleur et d’une barbarie innommables. Il n’y a aucune famille rwandaise qui ne déplore la perte d’au moins un de ses membres. Les FDU condamnent énergiquement tous ces crimes. Nous nous inclinons devant toutes ces victimes, nous honorons leurs mémoires et compatissons à la douleur des survivants, sans aucune distinction.

Lors de la création par le Conseil de Sécurité de l’ONU, le 08 novembre 1994, du TPIR, chargé de juger les auteurs de crime de génocide, de crime de guerre et des crimes contre l’humanité commis sur le territoire rwandais, et sur le territoire d’Etats voisins entre le 1 janvier et le 31 décembre 1994, le peuple rwandais a un moment cru à la possibilité d’une justice impartiale, sous les auspices de la Communauté Internationale. Une  justice pouvant aider à mettre un terme à l’impunité et constituer une solide fondation pour la réconciliation nationale au Rwanda. C’est pour cette raison que le peuple rwandais a salué avec grand espoir cette décision.

Aujourd’hui 13 ans après, le peuple rwandais est complètement déçu par ce tribunal, qui est devenu un instrument politique au service d’intérêts étrangers à la justice et à la réconciliation. Le TPIR est l’incarnation même d’une justice des vainqueurs. Il est utile de rappeler que le général Kagame et son équipe au pouvoir aujourd’hui sont co-responsables du drame rwandais comme le confirme un des transfuges du FPR, le lieutenant Ruzibiza . Ce dernier affirme que l’ Armée Patriotique Rwandais ( APR), dont le chef suprême et le général Kagame a massacré les gens de toutes les ethnies avec pour  objectif de semer l’anarchie pour faciliter sa prise du pouvoir, au prix même de l’extermination de tout un peuple. Et le général Dallaire commandant des Forces de l’ ONU au Rwanda ( MINUAR), dans son livre intitulé «  J’ai serré la mais du diable » écrit : « Quand j’ai demandé à Kagame d’aller directement à Kigali pour arrêter les massacres des Tutsi, il m’ a répondu que s’ il y avait un prix à payer, ce serait à ces Tutsi de le payer! »

Aujourd’hui les familles des victimes ne comprennent pas pourquoi, 13 ans après sa création, le bureau du procureur général du TPIR, dont le chef est Mr Hassan Boubacar Jallow, laisse les crimes du FPR impunis, alors qu’ il existe des témoignages abondants et accablants à charge des membres du FPR.

Si le TPIR avait mis fin à l’impunité dont jouissent les criminels au sein du gouvernement FPR, les 8.0000 personnes déplacées des camps de Kibeho (Sud-Ouest du Rwanda) n’auraient pas été massacrées, en une seule journée, le 22 avril 1995.

Si le TPIR avait mis fin à l’impunité dont jouissent les criminels au sein du régime FPR, 300.000 réfugiés rwandais et Congolais d’expression rwandaise n’auraient pas été massacrés dans les forêts congolaises. Si le TPIR avait mis fin à l’impunité dont jouissent les criminels au sein du régime FPR, la République Démocratique du Congo n’aurait pas été envahie. Elle n’aurait pas été le théâtre d’une guerre régionale. Les 4 millions de Congolais, morts directement ou indirectement à cause de la guerre d’agression lancée contre elle à partir de Kigali, seraient encore en vie.

Si le TPIR avait mis fin à l’impunité dont jouissent les criminels au sein du gouvernement FPR, il n’y aurait pas eu de tentatives de sécession du Nord-Kivu, abusivement présentées par un agent aux ordres de Kigali, sous la couverture de revendications fallacieuses et 700.000 Congolais déplacés par cette nouvelle agression seraient tranquillement occupés à se reconstruire et à reconstruire leur province.

La communauté internationale doit comprendre que l’indifférence manifestée envers tous les morts non Tutsi dans la région des Grand Lacs sera interprétée ni moins ni plus comme une complicité de génocide et en tout cas comme une caution aux crimes contre l’humanité imputables au régime FPR, responsable de ces massacres.


Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque, par mail.
Partager cet article
Repost0
20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 12:27
Marc GENTILINI, professeur émérite des maladies infectieuses et tropicales, ancien président de la Croix Rouge française


genilini.jpgMadame la Présidente, Monsieur le Ministre, Monsieur l'Ambassadeur, Messieurs les officiers Généraux, Mesdames, Messieurs, ce que j'ai à vous dire est simple. Je vais essayer d'expliquer pourquoi je suis là.
  • Quand j'ai commencé à m'occuper de la lutte contre le SIDA en Afrique, je suis allé voir le Directeur de l'Agence Nationale de Recherche contre le SIDA. Je lui ai dit "il faut absolument faire quelque chose en Afrique" il m'a répondu "je vais me renseigner" et on lui a conseillé "le plus calme, le plus sûr, le plus tranquille, le plus prometteur est au centre de l'Afrique : c'est le Rwanda." On a donc investi des sommes assez conséquentes pour la lutte contre le SIDA en Afrique, en choisissant la base de Kigali.
  • En 1940, j'avais 11 ans au moment de la débâcle. Accompagnant ma mère, infirmière de la Croix Rouge, engagée à l'hôpital militaire de Montdidier dans la Somme, j'ai vécu tout l'exode en première ligne ; c'est-à-dire en dernière. Nous avons accompagné les blessés, j'ai vu les gens se sauver pauvrement, tragiquement. Beaucoup plus tard, en juillet 1994, lorsque Philippe Douste-Blazy, Ministre de la Santé, m'a demandé de l'accompagner au Rwanda, les images de ce drame me rappelèrent brutalement celles de juin 1940.
  • J'ai lu les "pages paires et impaires" d'un petit livre imaginaire peu diffusé dont le titre serait "Histoire de l'aide humanitaire au Rwanda". Ce que j'ai vu, j'en ai parlé il y a quelque temps à l'Académie des Sciences d'Outre-mer devant le Général Lafourcade. Je m'y suis fait stratégiquement piéger : il m'a dit "il faut que vous portiez votre témoignage ailleurs."

Comme conseiller technique accompagnant discrètement son Ministre, j'ai vu des jeunes Français qui n'avaient aucun intérêt à être là, vivre eux aussi douloureusement le drame auquel ils étaient confrontés.


Retrouvez la suite de cette intervention dans les actes du colloque, par mail.
Partager cet article
Repost0